le 26 janvier 2017
Analyse d'ensemble des résidences services seniors, cet ouvrage juridique porte sur leur histoire, leurs difficultés, leur réforme par le législateur, le détail de leur réglementation juridique et fiscale, leurs implications économiques et sociales, leurs avantages... ZOOM sur l'analyse du décret du 26 octobre 2016 !
ÉTUDE
(Henri ISAIA - Janvier 2017)
L’application des dispositions transitoires de l’article 91 de la loi du 28 décembre 2015 d’adaptation de la société au vieillissement, concernant le statut des copropriétés avec services : mode opératoire et éléments d’information et de réflexion pour un choix éclairé.
Selon ce texte, le syndic : « doit inscrire chaque année à l’ordre du jour de l’assemblée générale des copropriétaires la question de la mise en conformité du règlement de copropriété avec les dispositions des articles 41-1 et 41-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée, dans leur rédaction résultant de la présente loi. La décision de procéder à la modification du règlement de copropriété est prise à la majorité prévue à l’article 26 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée. La mise en conformité du règlement de copropriété entraîne l’application des articles 41-1 à 41-6 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée, dans leur rédaction résultant du I de l’article 14. »
Ces dispositions de l’article 91 de la loi du 28 décembre 2015 permettent aux assemblées générales des syndicats de copropriétés avec services de basculer vers le nouveau statut juridique particulier qui a été prévu par les dispositions de l’article 14 de cette même loi. À condition qu’elles réunissent ce que l’on appelle la « double majorité qualifiée » de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, c’est-à-dire la majorité des membres du syndicat de copropriété représentant au moins les deux tiers des voix.
Tant que les dispositions transitoires de l’article 91 resteront en vigueur (aucune limite de durée d’application n’est prévue) les copropriétés avec services auront ainsi la possibilité, chaque année, soit de conserver le statut juridique particulier édicté par la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, soit d’adopter de façon définitive (il n’y aura pas de retour en arrière possible) le nouveau statut prévu par l’article 14 de la loi du 28 décembre 2015.
En effet, le vote dont il s’agit donne à l’assemblée générale des copropriétaires le choix entre :
- conserver le statut actuel dans lequel le syndicat de copropriété assure la gestion des services soit directement en régie, soit par conventions avec le syndic ou des tiers, en ayant l’obligation d’en mutualiser la charge entre les copropriétaires, qu’ils en soient ou pas consommateurs, par application du principe selon lequel tous les services leur sont, par nature, « utiles » ;
- adopter le nouveau statut dans lequel le syndicat de copropriété est tenu de confier la gestion de tous les services à des tiers et ce à l’exclusion du syndic, avec l’obligation d’en mutualiser la charge entre tous les copropriétaires lorsqu’il s’agit de services « non individualisables » et, au contraire, la possibilité de la répartir librement pour les services « individualisables » comme par exemple la restauration (l’intention du législateur ayant été de la faire supporter par les seuls consommateurs).
Compte tenu de l’importance stratégique de ce choix (de nature à déterminer, en effet, l’avenir de la résidence) il parait souhaitable de le préparer très soigneusement, selon une démarche associant le syndic et le personnel placé sous son autorité (principalement le directeur ou la directrice), ainsi que le conseil syndical, qui sera naturellement appelé à donner un avis consultatif (même si les dispositions de l’article 91 ne prévoient pas son intervention) et le conseil des résidents (auquel devra obligatoirement être communiqué l’ordre du jour de l’assemblée générale ayant à statuer sur le choix du régime juridique applicable à la résidence). Ceci pour mettre les intéressés en mesure de se prononcer en toute connaissance de cause.
À cette fin, la démarche à suivre pourrait s’inspirer du mode opératoire suivant :
1) Procéder à un état des lieux de la résidence.
état de l’immeuble, travaux à réaliser, problèmes en suspens (contentieux)…
- nombre d’appartements en distinguant studios, 2 pièces, 3 pièces…
- appartements occupés ou vacants, mis en vente publique, en situation d’héritage…
- faire une synthèse de la situation actuelle de la résidence à partir des documents budgétaires et comptables
- distinguer les charges de services (notamment de restaurant) par rapport au total des charges de copropriété ; évolution au cours des dernières années
- montant des charges impayées, contentieux en cours …
établir des informations non nominatives concernant le :
- prix moyen des appartements à la vente (studios, T 2, T 3)
- prix moyen des locations (studios, T 2, T 3)
- le sens de l’évolution au cours des dernières années
- comparaison avec les prix de vente et de location des copropriétés voisines sans services, mais de même standing
- évolution du quartier susceptible de modifier les conditions d’attractivité de la résidence…
- nombre total, répartition par sexe, évolution de la moyenne d’âge
- distinction entre résidents propriétaires et résidents locataires (en %)
- distinction entre résidence principale et résidence secondaire (en %)
2) Etablir une fiche pédagogique comparative faisant ressortir les caractéristiques essentielles du nouveau statut juridique particulier des copropriétés avec services prévu par l’article 14 de la loi du 28 décembre 2015 d’adaptation de la société au vieillissement et de celles du statut actuellement appliqué, issu de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement.
Validé par le Conseil syndical, ce document (voir annexe 1), serait destiné à être distribué éventuellement à tous les copropriétaires
Par ailleurs, y serait joint un mode de calcul permettant à chaque résident de déterminer actuellement ce que lui coûte réellement chaque repas pris au restaurant (coût fixe plus coût variable) avec comme but pédagogique de faire ressortir que, sous le statut actuellement en vigueur, plus la fréquentation du restaurant est importante, plus le prix de revient des repas diminue jusqu’à devenir très attractif (voir annexe 2).
3) Organiser des auditions (ou demander des avis écrits) devant le Conseil syndical, afin d’avoir connaissance de différents points de vue sur les implications du choix statutaire que les copropriétaires auront à faire.
Par exemple :
- le point de vue du syndic
- le point de vue du ou de la responsable qui s’occupe de la commercialisation et de la vente des appartements dans la résidence
- le point de vue du restaurateur (avec essai de calcul du point mort et du seuil de rentabilité du service de restauration dès lors que l’ensemble des coûts ne reposerait plus que sur les seuls résidents consommateurs)
- le point de vue du personnel (à travers la directrice et un représentant syndical)
- le point de vue d’autres responsables (SOPREGIM ; SOPREGI)…
4) Etablir et diffuser un questionnaire sur le service de restauration afin de connaître l’opinion des utilisateurs.
- préférences à propos du type de restauration (restaurant en salle avec service en plateaux, recours à des prestataires extérieurs livrant des repas, restauration collective ou artisanale, repas servis midi et soir…)
5) En cas d’existence d’une association de la loi de 1901 chargée de gérer un ou plusieurs services spécifiques, examiner la pertinence de son maintien compte tenu de l’évolution de la législation et de la jurisprudence.
Nous n’avons pas connaissance de décisions de la Cour de cassation qui auraient expressément validé, au regard des dispositions de la loi du 10 juillet 1965, la création d’associations de la loi de 1901 pour gérer directement les « services spécifiques » de résidences services de « première génération » (ou servir d’interface entre le syndicat de copropriété et les tiers auxquels elle en aurait délégué la gestion par convention).
À propos des résidence services Le Mans Renaissance et Renaissance, la Cour n’a pas admis la gestion des services par une association syndicale libre au motif « qu’il résulte des termes mêmes de l'article 1er de la loi du 21 juin 1865 et de l'article 1er de l'ordonnance du 1er juillet 2004 qu'une association syndicale libre ne peut avoir pour objet que des travaux de mise en valeur ou entretien d'immeubles » et non la gestion de services à des personnes (Cour de cassation, ch. civ. 3, 14 novembre 2012, n° 11-24450, inédit et n° 11-23.808, publié au Bulletin).
Par un raisonnement a contrario nous pourrions en déduire que dès lors qu’il est possible à une association de la loi de 1901 de proposer des services destinés à des personnes (à condition qu’elle n’ait pas un but lucratif), son intervention en qualité de prestataire de services spécifiques devrait être admise. En effet, l'association est un contrat civil entre au moins deux personnes qui décident de mettre en commun leurs compétences et moyens au service d'un projet, dans un but non lucratif (article 1er de la loi du 1er juillet 1901). Ainsi, la mutualisation et la gestion désintéressée sont caractéristiques de l'association, ce qui correspond aussi aux principes fondateurs des résidences services de « première génération ». Il n'y a aucune limitation quant à la nature du projet associatif, sauf : « un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes moeurs, ou qui aurait pour but de porter atteinte à l'intégrité du territoire national et à la forme républicaine du gouvernement " (article 3 de la loi 1901).
Toutefois, depuis une décision de la Cour de cassation (ch. civ. 3, 8 octobre 2015, n° 14-19245, publiée au Bulletin) qui se situe dans le cadre du statut particulier de copropriété énoncé par la loi du 13 juillet 2006, nous savons que seul le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic en exercice, a le pouvoir d’agir en recouvrement des charges de copropriété, dès lors qu’il s’agit de charges de fonctionnement. Par conséquent, l’action engagée à cette fin par une association de la loi de 1901 qui gérait des services spécifiques et avait reçu mandat de l’assemblée générale des copropriétaires pour recouvrer les charges de copropriété (réparties en fonction du principe d’utilité) est irrecevable.
La plupart des associations de la loi de 1901 chargées de gérer des services spécifiques dans les résidences seniors de « première génération » remontent aux origines de ces établissements, c’est-à-dire le plus souvent avant les années 2000. Leur pérennité se heurte actuellement à une double difficulté juridique.
D’une part, suite à différents litiges portés devant les tribunaux judiciaires, la Cour de cassation a été amenée, dans sa décision d’Assemblée plénière du 9 février 2001, n°99-17642, à rappeler, dans les mêmes termes, la règle posée par l’article 4 de la loi du 1er juillet 1901, selon laquelle : « tout membre d’une association qui n’est pas formée pour un temps déterminé peut s’en retirer en tout temps, après paiement des cotisations échues et de l’année courante, nonobstant toute clause contraire ». De cette liberté de se retirer, elle a en effet déduit que : « hors les cas où la loi en décide autrement, nul n’est tenu d’adhérer à une association régie par la loi du 1er juillet 1901, ou, y ayant adhéré, d’en demeurer membre ».
- voir dans le même sens la décision de la Cour de cassation, ch. civ. 3, du 20 décembre 2006, n° 05-20689, publiée au Bulletin, de laquelle il ressort aussi que cette jurisprudence s'applique quelle que soit la durée pour laquelle l'association a été constituée ;
- voir également la décision de la Cour de cassation, ch. civ. 1, du 11 mars 2014, n°13-14341 ainsi rédigée :
« Vu l’article 1134 du code civil, ensemble les articles 11 de la Convention européenne des droits de l’homme et 4 de la loi du 1er juillet 1901 ;
Attendu qu’il résulte de ces textes que nul n’est tenu d’adhérer à une association régie par la loi du 1er juillet 1901 ou, y ayant adhéré, d’en demeurer membre, que tout membre d’une association, qui n’est pas formée pour un temps déterminé, peut s’en retirer en tout temps après paiement des cotisations échues et de l’année courante, nonobstant toute clause contraire, et que les dispositions statutaires entravant la liberté de ne pas adhérer à une association ou de s’en retirer en tout temps sont entachées d’une nullité absolue »
Ainsi, le droit de se retirer d’une association est d’ordre public. Il s'en suit que toute clause qui limite ce droit de retrait ou le soumet à conditions est nulle.
La décision dont il s’agit ajoute que : « les cotisations dues par l'adhérent démissionnaire pour l'année en cours, en application de l'article 4 de la loi du 1er juillet 1901, sont uniquement celles qui sont versées pour financer le fonctionnement de l'association ; que l'adhérent démissionnaire n'est en revanche aucunement tenu de verser après son départ des sommes, fussent-elles qualifiées par les statuts de cotisations, ayant pour objet de rémunérer un service qui lui était rendu par l'association ; que, dans une telle hypothèse, le maintien des cotisations nonobstant le départ de l'adhérent et l'absence de tout service dû à celui-ci s'analyse en un dédit contraire au principe de la liberté d'association…» ;
(en effet, les cotisations d’une association ne peuvent correspondre à la rémunération de services, sauf si aucun des services rendus n’est payant ; ainsi, par exemple, dans les résidences services seniors, « les prestations individualisées » versées par les copropriétaires au titre des repas constituent des rémunérations de services ; dans le cas où l’association gestionnaire des services n’aurait pas prévu dans ses statuts l’existence de cotisations dues par ses membres, lesdites prestations, si elle les encaissait, ne sauraient valoir cotisations)
D’autre part, du fait d’une modification due à la loi du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allègement des démarches administratives, l’article 4 de la loi du 1er juillet 1901 dispose désormais que : « tout membre d’une association peut s’en retirer en tout temps, après paiement des cotisations échues et de l’année courante, nonobstant toute clause contraire. »
Cette évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation et de la loi du 1er juillet 1901 remet en cause la légitimité – à supposer qu’elle existe - du recours à une association de la loi de 1901 pour gérer des services spécifiques dans une copropriété avec services.
Lorsque, comme c’est généralement le cas, tous les copropriétaires sont désignés d’office membres de l’association par les statuts, si certains d’entre eux décidaient d’en sortir ou refusaient d’en être membres lors de leur arrivée dans l’établissement, le fondement juridique des charges de copropriété qui leur seraient réclamées (en application du principe d’utilité posé par l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965) et des « prestations individualisées » deviendrait incertain. En effet, n’étant plus membres de l’association ils seraient privés d’informations et de tout pouvoir de décision et de contrôle sur l’organisation et le fonctionnement des services spécifiques gérés par elle (et en cas de sous-traitance à des tiers, sur les modalités des contrats conclus avec ceux-ci), ainsi que sur les tarifs pratiqués et l’utilisation des sommes qui lui seraient versées par le syndicat de copropriété et par les résidents en tant que consommateurs.
Cela alors que le règlement de copropriété indiquerait que l’immeuble est à destination de résidence services et qu’à cette fin le syndicat de copropriété aurait inclus dans son objet la fourniture de services spécifiques. Les intéressés, arguant de leur droit de refuser d’adhérer à l’association, pourraient décider de cesser de payer les charges de fonctionnement des services et les sommes dues au titre des « prestations individualisées » et réclamer que la gestion desdits services s’effectue par le syndicat de copropriété, soit en régie (sous la direction du syndic), soit par un tiers. Dès lors, il serait imprudent de leur interdire l’accès aux services gérés par l’association car cela pourrait être constitutif d’un préjudice qui, compte tenu de la durée des instances judiciaires, risquerait de s’avérer finalement très élevé dans le cas où les tribunaux leur donneraient raison.
Certes, il a été jugé que le droit de se retirer de l’organisme de gestion (en l’occurrence l’association) : « n'implique pas le droit de se retirer de la catégorie des appartements avec services ; qu'en décider autrement reviendrait à permettre à terme que la résidence avec services devienne une résidence simple, sur l'initiative individuelle des copropriétaires de chaque "appartement-services" ; que ceci serait une modification de la destination de l'immeuble… » (Cour d’appel de Paris, 10 janvier 2008, n° 07-06191). Ainsi, en principe les charges de services resteraient dues par les copropriétaires qui auraient quitté l’association, à condition toutefois qu’elles aient été légalement établies.
Il reviendrait alors au syndic d’agir en justice (donc comme demandeur, ce qui est généralement la position la plus difficile dans un procès) en vue du recouvrement des charges impayées et de prouver, à cette fin, la légalité desdites charges en cas de gestion des services spécifiques par une association à laquelle les copropriétaires récalcitrants, comme ils en ont le droit, ne seraient pas ou plus membres. À notre connaissance, aucune décision de jurisprudence n’a statué sur une telle situation.
Dans le cas où de nombreux copropriétaires décideraient de quitter l’association et de ne plus payer les charges de services, pour éviter tout risque d’illégalité qui rendrait impossible le recouvrement de celles-ci, le mieux serait de demander à l’assemblée générale du syndicat des copropriétaires de valider toutes les décisions prises par l’association. Ce qui rendrait alors son existence pratiquement inutile et devrait conduire logiquement à sa suppression.
5) Procéder à une réflexion sur les enjeux de pouvoir en cas de changement de statut.
Dans une copropriété avec services, les acteurs amenés à intervenir juridiquement sont les suivants :
- le syndicat de copropriété, personne morale de droit privé, par ses organes de décision (l’assemblée générale des copropriétaires), d’exécution (le syndic, qui est son représentant légal et mandataire et qui a autorité sur le personnel de la résidence dont le directeur ou la directrice) et, enfin, de contrôle (le conseil syndical, ainsi que le conseil des résidents créé par la loi du 28 décembre 2015 d’adaptation de la société au vieillissement, tous deux dotés de pouvoirs consultatifs, mais aussi de « gestion courante » par délégation de l’assemblée générale en ce qui concerne le conseil syndical) ;
- les tiers, prestataires de services spécifiques, qui ont passé des conventions avec le syndicat de copropriété.
Des locataires sont également présents dans l’établissement, liés par des baux d’habitation de droit commun avec les copropriétaires.
Il faut aussi tenir compte de la société commerciale qui intervient dans l’achat, la revente et la location des appartements et auxquels les copropriétaires et les particuliers intéressés ont la possibilité, mais pas l’obligation, de recourir.
En réalité, les rôles des acteurs tels qui sont définis par les textes en vigueur peuvent être interprétés de façon sensiblement différente. Cela tient au fait que le fonctionnement d’une copropriété avec services n’est pas exempt d’enjeux de pouvoir, visibles (au niveau des avoirs) ou invisibles (d’ordre psychologique), c’est-à-dire de gains ou de pertes pour les parties prenantes et de modifications de leur état d’esprit. Parfois, le président du conseil syndical, à cause de sa forte personnalité et/ou de ses connaissances, peut, bénévolement et avec l’assentiment de la majorité des membres du conseil, prendre le pas sur le syndic et assurer presque à lui seul la direction effective de l’établissement. Ce peut être aussi le cas de la directrice lorsqu’elle a le goût du pouvoir, que le syndic lui fait entièrement confiance et que le conseil syndical exerce a minima son activité de contrôleur et n’a pas reçu délégation pour la gestion courante des services. Souvent le syndic assume pleinement ses obligations de représentant légal et mandataire du syndicat de copropriété et veille à ce que les organes chargés de le contrôler ne dépassent pas leur rôle tel qu’il a été défini par la loi. Exceptionnellement, il peut arriver que les tensions entre les différents protagonistes où les oppositions à l’un où l’autre d’entre eux soient suffisamment fortes au sein de la résidence pour qu’elles rendent celle-ci ingérable et nécessitent le recours au juge afin qu’il désigne un administrateur judiciaire. Enfin, dans un proche avenir il sera intéressant de voir comment le conseil des résidents, institué dans l’ancien comme dans le nouveau statut particulier de copropriété, parviendra à jouer pleinement son rôle face aux différents acteurs que nous venons d’évoquer.
Le choix statutaire prévu par les dispositions de l’article 91 de la loi du 28 décembre 2015 devrait intéresser plus d’une centaine de résidences services seniors (celles dites de « première génération »). Avant de prendre parti pour ou contre le nouveau statut particulier des copropriétés avec services édicté par l’article 14 de cette loi, une réflexion sur les enjeux de pouvoir qui découleraient de son application s’avérerait utile. En effet, les situations et intérêts en présence s’en trouveraient au moins en partie modifiés et parfois menacés. Le changement de statut devrait être aussi l’occasion de professionnaliser un peu plus l’administration de la résidence, afin de rendre celle-ci plus attractive sans pour autant en aggraver les charges mais au contraire en essayant de mieux les maîtriser.
Examinons donc ce que serait la situation dans l’hypothèse d’un changement de statut et les conséquences susceptibles d’en ressortir pour les intéressés.
L’assemblée générale des copropriétaires, organe souverain du syndicat de copropriété, aurait à faire face à des choix sensiblement différents, du fait de la disparition de la gestion des services en régie et sans doute par voie d’associations de la loi de 1901. Aux questions traditionnelles, assez bien connues des résidents, concernant la garde, l’entretien et la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes, s’ajouteraient, plus souvent que sous le précédent statut, des problèmes touchant à la situation économique et financière des entreprises susceptibles de fournir des services spécifiques, à la passation et à la gestion de contrats commerciaux ainsi qu’à l’octroi de prêts à usage. En effet, à la différence de la situation passée, l’assemblée générale aurait à se prononcer obligatoirement sur des services spécifiques tous conventionnés avec des entreprises commerciales.
En ce qui concerne les services non individualisables, obligatoirement inclus dans l’objet du syndicat de copropriété, il est permis de penser que les trois catégories énoncées par le décret du 26 octobre 2016 devraient nécessairement être crées par l’assemblée générale pour que l’établissement puisse être reconnu comme étant une « copropriété avec services ». Il s’agirait alors d’un « socle minimum » comprenant l'accueil personnalisé et permanent des résidents et de leurs visiteurs, la mise à disposition d'un personnel spécifique attaché à la résidence éventuellement complétée par des moyens techniques permettant d'assurer une veille continue de la sécurité des personnes et la surveillance des biens, enfin le libre accès aux espaces de convivialité et aux jardins aménagés (un tel socle minimum est prévu par exemple pour les EPAD en ce qui concerne les prestations d’hébergement).
Les charges de copropriété afférentes à ce type de services seraient, comme auparavant, « mutualisées », c’est-à-dire que les sommes versées au prestataire seraient réparties entre tous les copropriétaires par application du principe d’utilité prévu par le premier alinéa de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965. Chaque trimestre, les copropriétaires participeraient au coût de ces services au titre des dépenses courantes de fonctionnement de la copropriété. Sous le statut précédent, ce mode de répartition était appliqué à l’ensemble des services spécifiques (article 41-3 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa rédaction issue de la loi du 13 juillet 2006).
Sous le nouveau statut les services individualisables n’entreraient pas dans l’objet du syndicat et par conséquent ils ne seraient pas nécessaires à l’existence d’une copropriété avec services. Ce caractère superflu faciliterait évidemment une réduction des charges de copropriété dans ce genre d’établissement, par exemple du fait de la suppression pure et simple du service de restauration.
Pour ces services, avant de statuer sur les conventions avec les prestataires, l’assemblée générale devrait apporter des modifications au règlement de copropriété, afin de prévoir l’affectation de certaines parties communes à leur fourniture aux occupants de l’immeuble. Étant donné que leur « désaffectation » ultérieure ne pourrait éventuellement être obtenue qu’aux conditions de majorité de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 (la « double majorité qualifiée »), il est permis de penser que, faute d’indication expresse dans l’article 41-2 de cette même loi dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2015 et par parallélisme des formes, le vote relatif à leur « affectation » devrait obéir aux mêmes conditions. Les modifications apportées au règlement préciseraient « la charge des dépenses d’entretien et de fonctionnement liées à ces parties communes et sa répartition » (cf. le même article 41-2). Il est clair que l’intention du législateur a été que ces charges puissent être imputées aux seuls consommateurs (en ce sens cf. par exemple le Rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi, modifié par la Sénat, relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, par Mme Joëlle Huillier, députée et plus précisément le commentaire de celle-ci à propos de l’amendement AS44). Mais de quelle façon ? Les travaux parlementaires ne contiennent aucune précision sur de point. La répartition en fonction des tantièmes de copropriété ne permettrait pas d’atteindre le but visé. La solution pourrait consister à faire payer les consommateurs au prorata du montant des abonnements qu’ils auraient souscrits pour les services (avec sans doute des calculs trimestriels suivi d’une régularisation en fin d’année).
En application de l’article 11 de la loi du 10 juillet 1965 (qui est une disposition d’ordre public en vertu de l’article 43 de la même loi), les modifications de la répartition des charges de copropriété qui devraient en résulter exigeraient un vote de l’assemblée générale des copropriétaires à l’unanimité de ses membres et de leur voix. Soit un résultat plus difficile à atteindre que celui nécessaire au changement de statut. Dans le cas où l’unanimité ne serait pas obtenue, il resterait la possibilité d’une action en nullité devant le tribunal de grande instance, sur le fondement de l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965, car la répartition existante, maintenue par l’assemblée générale malgré le changement de statut, serait contraire aux dispositions, elles aussi d’ordre public, de l’article 41-2 de cette même loi dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2015. Comme il s’agirait de contester une clause d’un règlement de copropriété devenue contraire au statut légal, l’action en nullité ne serait pas limitée dans le temps (elle serait imprescriptible) et elle pourrait être engagée par tout copropriétaire.
Ensuite, l’assemblée générale devrait « choisir » (donc au moins entre deux candidats) le prestataire de services individualisables qui aurait sa préférence parmi ceux présélectionnés par le syndic ou, en cas de délégation de gestion courante, par le conseil syndical. Ce qui l’amènerait à examiner les différents aspects de la situation économique et financière des entreprises soumises à son appréciation, ainsi que leurs propositions concernant la nature des prestations prévues et leur prix. Puis, pour les candidats retenus, elle aurait à adopter les termes de la convention de « prêt à usage » envisagée avec chacun eux. Cette convention, fondée sur les dispositions des articles 1875 à 1904 du code civil, bien que correspondant à un prêt gratuit, n’interdirait pas de mettre à la charge du bénéficiaire les frais liés à l’utilisation, à la garde et à l’entretien des parties communes qui lui seraient affectées. Sous le statut précédent la situation de fait des prestataires s’avérait, à cet égard, souvent proche de ce procédé juridique, mais sans qu’il soit formalisé. La convention dont il s’agit devrait être signée pour une durée de 5 ans au plus, mais renouvelable (article 41-3 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2015). Les deux temps de cette procédure d’attribution des services individualisables nécessiteraient chacun un vote à la « majorité qualifiée » de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 (majorité des voix de tous les copropriétaires).
Le syndic, qu’il s’agisse d’une personne physique ou morale, apparaîtrait comme une victime du nouveau statut, puisque celui-ci lui interdirait toute gestion des services (interdiction absolue, car étendue aux personnes physiques ou morales qui lui seraient proches). Ceci afin d’éviter tout conflit d’intérêt entre lui et les prestataires de services, comme cela avait parfois été constaté sous le statut antérieur, lorsqu’il faisait travailler des sociétés où il avait des intérêts (lui ou un membre de sa famille) sans le faire savoir et, surtout, sans obtenir d’autorisation de l’assemblée générale. Ses responsabilités se trouveraient amoindries en matière de personnel, en tant que délégataire des pouvoirs détenus en cette matière par le syndicat de copropriété, dès lors que la copropriété n’en aurait plus tellement besoin puisque tous les services seraient fournis par des tiers. Il ne lui resterait en principe que son rôle traditionnel, défini par la loi du 10 juillet 1965, modifiée par celle du 24 mars 2014 (loi Alur) : à savoir, faire appliquer le règlement de copropriété par l’ensemble des occupants de l’immeuble et mettre en œuvre les décisions votées par l’assemblée générale des copropriétaires. Avec à la clé les missions prévues à ces fins, dont notamment la prise en charge de l’administration et la conservation de l’immeuble, l’établissement du budget prévisionnel, des comptes du syndicat de copropriété et des décomptes individuels de charges, le recouvrement de ces charges auprès de chaque propriétaire et la tenue des archives de la copropriété et, enfin, la convocation de l’assemblée générale des copropriétaires. Toutefois, étant le représentant légal et le mandataire du syndicat de copropriété, qu’il représente en justice, et intervenant dans une copropriété avec services, il serait tout de même partie prenante à la préparation, la conclusion et l’exécution des conventions de services passées avec les tiers, lorsque le conseil syndical n’aurait pas reçu de l’assemblée générale délégation pour les actes de gestion courante.
En revanche, le syndic, comme sous le statut précédent, serait déchargé de l’essentiel de ces taches dans le cas où l’assemblée générale, à la majorité absolue des voix de tous les copropriétaires (article 25 de la loi du 10 juillet 1965), aurait accordé cette délégation (une possibilité prévue par l’alinéa 2 de l’article 41-6 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2015), incluant par conséquent les opérations préparatoires à l’élaboration des conventions devant être conclues avec les prestataires.
En tout état de cause et pour des raisons de compétence et d’efficacité il serait souhaitable, selon nous, pour traiter au mieux l’ensemble des questions touchant à la préparation, la conclusion et l’exécution des contrats de prestations de services spécifiques et de prêt à usage des parties communes, et utiliser à ces fins des outils informatiques, que soit créé un emploi ou au moins une fonction de « gestionnaire de contrats » (ou de « régisseur »). Ce nouvel acteur, compétent en informatique, serait chargé d’aider le syndic, ainsi que le conseil syndical en cas de délégation de gestion courante, à assumer toutes ces tâches. Il aurait aussi à répondre aux demandes d’informations du conseil syndical et du conseil des résidents, aux réunions desquels il pourrait être présent avec le syndic. Après l’adoption des conventions par l’assemblée générale il en assurerait le pilotage, à partir d’un « tableau de bord » informatisé comprenant des indicateurs de suivi et, grâce à cette « veille stratégique », il s’efforcerait de garantir en permanence de bons niveaux d’exécution des services conventionnés.
L’adoption du nouveau statut de copropriété devrait aussi conduire à un réexamen du poste de directrice (ou directeur) de l’établissement.
N’ayant plus de services et pratiquement pas de personnel à diriger (hormis les agents d’entretien) le rôle de la directrice devrait sans doute être réorienté.
L’intéressée pourrait développer des fonctions d’« animatrice socio-culturelle ». À ce titre elle serait chargée notamment d’identifier les besoins dans ce domaine (pour des personnes dont la moyenne d’âge dépasse généralement 80 ans), de concevoir et de coordonner des programmes d’activités et de sorties propres à rendre la vie des résidents et de leurs aidants agréable et conviviale, de développer et animer une démarche participative visant à renforcer les liens sociaux au sein de l’établissement. Elle aurait aussi un rôle d’interface entre les résidents et leurs familles. Un réseau intranet propre à la résidence lui permettrait de recueillir et diffuser des informations utiles dans le domaine socio-culturel, concernant par exemple les activités de cette nature proposées par la commune d’implantation de la résidence ou les communes voisines, ainsi que par les associations locales de personnes âgées. Son action de proximité avec les résidents se conjuguerait tout en la complétant avec celle des prestataires de services.
S’agissant plus généralement du personnel de la résidence, il verrait certainement ses effectifs se réduire notamment à cause de la disparition totale de la gestion en régie des services spécifiques. L’obligation de conventionner ceux-ci avec des tiers soulèverait des problèmes de maintien et de reclassement du personnel existant, avec éventuellement transfert aux nouveaux prestataires des contrats de travail. Le personnel dont il s’agit relève généralement de la convention collective des gardiens, concierges et employés d’immeubles ou de celle de la restauration de collectivités. En raison du nombre probablement peu important de copropriétés avec services susceptibles de basculer en même temps vers le statut prévu par la loi du 28 décembre 2015, ainsi que du personnel concerné, jusque là peu actif en matière d’action syndicale, les risques de grève dans les établissements concernés seraient sans doute minimes (aux antipodes de la situation que connaît parfois un pays comme le Canada où, en 2016, le personnel de plus de 40 résidences services s’est mis en grève illimitée en même temps).
Le conseil syndical, dont l’existence est obligatoire dans une copropriété avec services, exercerait les pouvoirs qui lui ont été dévolus par les textes en vigueur et qui lui permettraient notamment, en cas de délégation de gestion courante, de jouer un rôle déterminant pour tout ce qui concerne les conventions de services conclues avec les tiers. L’élection au sein de celui-ci d’une forte personnalité en qualité de président y contribuerait encore un peu plus.
Le conseil syndical pourrait, comme sous le statut particulier de copropriété prévu par la loi du 13 juillet 2006, se voir déléguer par l’assemblée générale « les décisions relatives à la gestion courante des services spécifiques » (alinéa 2 de article 41-6 de la loi du 10 juillet 1965 issu de la loi du 28 décembre 2015), sous condition d’un vote favorable à la « majorité qualifiée » (majorité des voix de tous les copropriétaires, selon l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965). À défaut d’avoir reçu une telle délégation (totale ou partielle), son rôle se limiterait à donner des avis consultatifs sur les projets de conventions avec les prestataires. De toute façon, après l’adoption de celles-ci par l’assemblée générale, il en surveillerait l’exécution et lui en présenterait un bilan chaque année (alinéa 3 de l’article 41-6 de la loi du 10 juillet 1965 issu de la loi du 28 décembre 2015), ce qui était aussi le cas dans le passé. De même, le président du conseil syndical exercerait, en outre, les responsabilités spécifiques résultant du décret du 17 mars 1967 (possibilité d’agir en justice contre l’ancien syndic en vue d’obtenir la restitution des fonds et des archives, sous certaines conditions de convoquer l’assemblée générale, et, enfin, de demander au tribunal de grande instance de désigner un administrateur provisoire si les copropriétaires ne parvenaient pas à désigner un syndic). Il serait aussi souhaitable qu’il ait une bonne maîtrise des outils informatiques pour faire circuler toutes les informations utiles concernant la gestion de la résidence, que ce soit entre membres du conseil, avec le syndic et le personnel de direction, ainsi qu’avec les autres copropriétaires.
Dans l’hypothèse, très probable, où l’assemblée générale lui donnerait délégation pour la gestion courante des services et en tenant compte de toutes les prérogatives que la législation en vigueur lui attribue, le conseil syndical serait un élément majeur du fonctionnement de la résidence, au moins autant et sinon plus que sous le régime juridique antérieur. Car la loi du 24 mars 2014 a renforcé ses pouvoirs en prévoyant l’association obligatoire du conseil syndical avec le syndic pour l’élaboration du budget prévisionnel, la possibilité d’accéder « en ligne » à un espace sécurisé dans lequel le syndic est tenu de déposer un certain nombre de documents relatifs à la gestion de la copropriété et qui ne sont accessibles qu’au seul conseil syndical, et, enfin, la convocation possible de l’assemblée générale par le président de celui-ci en cas d’empêchement du syndic, alors même que le règlement de copropriété ne l’aurait pas prévu (ce qui est une nouveauté).
Une telle situation présenterait des avantages. Généralement, le président et la plupart des membres du conseil syndical vivent dans la résidence et sont donc proches de tous ses occupants. Une activité bénévole importante, notamment du président, en matière d’administration générale et de conventions de services pourrait se traduire par des économies au niveau des honoraires du syndic, à qui une partie des taches ainsi prises en charge auraient pu être confiées moyennant rémunération particulière.
Toutefois, comme sous le statut précédent, la solution ne serait réellement avantageuse que si le président du conseil syndical et ses membres se montraient capables collégialement de fonctionner en bonne entente, de rester dans les limites des pouvoirs qui leur sont conférés par les textes et de mettre en œuvre des compétences suffisantes pour traiter des problèmes, parfois complexes, susceptibles de se poser en matière de conventions avec les tiers. En sachant cependant que pour mener à bien la gestion courante des services, le conseil syndical aurait, comme auparavant, la possibilité de demander, par exemple à titre de suppléants, l’aide bénévole de résidents non membres (mais ayant des compétences particulières) et se faire assister par toute personne qualifiée de son choix, les honoraires de ces personnes étant réglés par le syndic pour le compte de la copropriété.
Sous le statut issu de la loi du 13 juillet 2006, la gestion des services spécifiques était plus ou moins partagée, dans la pratique, entre le syndic et le conseil syndical, ce qui impliquait presque nécessairement complémentarité et coopération entre l’un et l’autre. La possibilité pour le syndic d’être présent aux réunions du conseil syndical jouait dans le même sens. En cas d’application du nouveau statut, le syndic, dépourvu d’une partie de ses pouvoirs dans le domaine des services, serait un peu marginalisé par rapport au conseil syndical, ce qui remettrait en cause le relatif équilibre constaté précédemment.
S’agissant du tout récent « conseil des résidents » il lui appartiendrait de s’adapter aux conditions du nouveau statut de copropriété dans lequel il serait appelé à intervenir.
Doté des mêmes pouvoirs consultatifs que ceux qui seraient à sa disposition dans le cas où la résidence conserverait le statut issu de la loi du 13 juillet 2006, son action pourrait t’elle s’avérer quelque peu différente?
La loi du 28 décembre 2015 l’a institué au sein des copropriétés avec services en disposant qu’il s’agit d’une « instance consultative » qui « relaie les demandes et les propositions des résidents auprès des copropriétaires », tout en le chargeant également d’émettre des avis, spécialement sur le besoin de créer ou de supprimer un service. À cette fin les informations concernant les services spécifiques doivent lui être communiquées. Il est composé des personnes demeurant à titre principal dans la résidence, définies par le décret du 26 octobre 2016 comme étant celles : « qui y occupent un logement au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle ou raison de santé, soit en tant que titulaire d'un droit d'occupation réel ou personnel, soit en tant que conjoint ou partenaire d'un pacte civil de solidarité du titulaire d'un tel droit. » (ce qui l’ouvre aux locataires - leur offrant ainsi, pour la première fois officiellement, une possibilité d’expression libre et collective - et exclut au contraire les copropriétaires non résidents). Sous le régime antérieur, dans certaines copropriétés avec services des réunions informelles de locataires existaient déjà, généralement à l’initiative du président du conseil syndical. Selon le décret du 26 octobre 2016 le conseil des résidents, qui peut se réunir de sa propre initiative, est présidé par un résident élu au scrutin secret à la majorité des votants. L'ordre du jour de la prochaine assemblée générale lui est communiqué par le syndic au moins sept jours avant la réunion, après anonymisation des documents contenant des informations à caractère personnel.
Il ressort également des travaux parlementaires qui ont conduit à la loi du 28 décembre 2015 que l’intention du législateur, après un peu d’hésitation, a été d’éviter que cet organisme consultatif devienne un lieu de confrontation entre les propriétaires et les locataires, jusque là jamais réunis ensemble par les règles de droit en vigueur (le texte initial du projet de loi en faisait « un espace de discussion » entre les propriétaires et les locataires).
Ainsi, la tâche consistant à relayer, c’est-à-dire non pas à débattre mais seulement à transmettre aux copropriétaires, qui ne vivent pas tous dans la résidence, soit individuellement, soit au niveau de l’assemblée générale, les demandes des résidents serait identique à celle remplie par le conseil des résidents institué dans le cadre de l’ancien statut de copropriété.
Cet organisme nouveau pourrait trouver sa principale raison d’être, dans l’un comme l’autre des deux statuts, en fixant principalement son attention sur les circonstances de fait propres au fonctionnement des services, dès lors que ses membres vivant tous dans l’établissement, la plupart d’entre eux en seraient consommateurs. Ainsi, ses préoccupations devraient porter sur la qualité des prestations, la façon dont le service serait assuré, les améliorations possibles, la pertinence des horaires, les ruptures de service ou changements imprévus, les rapports qualité/prix, les indices de satisfaction des consommateurs, etc. En revanche, les difficultés juridiques (dérivant principalement du contenu des conventions) ne seraient examinées que de façon secondaire (lorsque la liaison entre circonstances de fait et de droit serait très étroite). Cette préférence donnée aux questions concrètes relatives au fonctionnement réel des services serait d’autant plus intéressante que le conseil des résidents pourrait se réunir plus souvent et de façon moins coûteuse que l’assemblée générale des copropriétaires. Cette orientation, qui donnerait lieu éventuellement à des rencontres avec les tiers prestataires de services, permettrait d’éviter que ses réunions fassent double emploi avec les assemblées générales de copropriétaires, dont les débats porteraient plutôt sur des questions d’ordre juridique. En outre, contrairement au conseil syndical, le conseil des résidents ne serait pas un organe seulement représentatif, issu d’élections. Du fait qu’il réunirait tous les intéressés, ceux-ci se verraient conviés à un exercice de démocratie directe portant sur l’appréciation de la bonne qualité des services qui leur seraient destinés. Partant de cette attention portée aux modalités de fonctionnement des services spécifiques, le conseil des résidents serait alors tout à fait à même d’émettre des avis sur le besoin d’en créer de nouveaux ou de supprimer certains déjà existants, comme la loi lui en aurait donné mission.
Dans les résidences services seniors de « première génération » les promoteurs immobiliers ont, dès l’origine, souvent pris aussi en charge la gestion des établissements en assurant par des voies plus ou moins directes, la fonction de syndic et celle de fournisseur de services. Les copropriétaires ont parfois contesté ce système en arguant de son coût et des risques de conflits d’intérêts, préférant que le syndicat de copropriété fasse appel à un syndic traditionnel cantonné à ses missions normales et gère les services soit en régie, soit par conventions passées avec des tiers, voire éventuellement en les confiant à une association de la loi de 1901.
Sous le nouveau statut, comme déjà indiqué ci-dessus, les tiers prestataires des services spécifiques ne devraient plus avoir aucun lien, de près ou de loin, avec la personne physique ou morale exerçant les fonctions de syndic. Les sociétés ou groupes qui auparavant réunissaient les fonctions de syndic et de prestataires de services auraient à faire face à ce problème. Il leur appartiendrait alors de définir une nouvelle stratégie afin d’assurer au mieux la défense de leurs intérêts.
Les fournisseurs de services non individualisables seraient rémunérés directement par le syndicat de copropriété, sur la base des stipulations des conventions conclues avec eux, définissant dans le détail les prestations prévues et les conditions de leur exécution.
Au contraire, et ce serait une nouveauté, le changement de statut obligerait chaque résident (copropriétaire ou locataire) désireux de bénéficier des services individualisables à signer personnellement avec leurs fournisseurs des contrat